Le tracé
Les gazoducs Hauts de France : une opération archéologique « à plein tube »
GRTgaz possède et exploite en France le plus long réseau de transport de gaz naturel à haute pression d'Europe. En 1997, l’entreprise a engagé les travaux de pose d’une canalisation reliant la station de Loon-Plage, dans le Nord, au site de stockage souterrain situé sur les communes de Cuvilly et de Gournay-sur-Aronde, dans l’Oise. Dénommé Artère des Hauts de France I, ce gazoduc a fait l’objet d’un doublement en 2013 (Artère des Hauts de France II). Des opérations archéologiques conduites par l’Inrap ont eu lieu à l’occasion des deux phases du chantier, davantage dans la région Nord-Pas de Calais en 1997 (de février à juillet), et de façon plus importante en Picardie de mars 2012 à février 2013.
Un tracé étroit et long
Le chantier de construction d’un gazoduc présente des caractéristiques particulières : longueur et étroitesse du tracé, positionnement de préférence à l’écart des zones urbanisées, rapidité d’exécution du chantier, interférence avec d’autres intervenants et forte exigence sur la sécurité du chantier et les questions environnementales. Les opérations archéologiques conduites par l’Inrap sur les canalisations Hauts de France et Hauts de France II ont dû tenir compte de ces données.
Un chantier archéologique rapide
L’intervention archéologique sur un gazoduc est parfaitement insérée dans le déroulement du chantier et le moindre retard aura des conséquences directes sur le planning global de l’opération. L’intérêt du maître d’ouvrage est donc que les opérations archéologiques soient réalisées le plus en amont possible, afin de limiter les interférences entre les intervenants et le chantier de pose.
Un partenariat efficace
Aussi, pour répondre à ces contraintes, les équipes opérationnelles de l’Inrap ont-elles développé, depuis plus de 15 ans, des méthodes de travail adaptées à ce type de tracé. Le partenariat signé en septembre 2011 avec le maître d’ouvrage GRTgaz est venu entériner la qualité de cette collaboration, qui, depuis, a été mise en œuvre sur plusieurs autres tracés en Nord-Pas de Calais, en Picardie, en Champagne-Ardenne et, prochainement, en Bourgogne.
Des méthodes de diagnostic spécifiques
Première étape du travail des archéologues, le diagnostic a pour objectif la détection de sites archéologiques sur l’épaisseur de sol concernée par les travaux. Dans le cas du gazoduc Hauts de France, le diagnostic s’est déroulé entre 0 et – 3,00 m de profondeur. À l’issue de cette étape, les archéologues doivent être en mesure de préciser l’ampleur, la nature, la densité et l’état de conservation des vestiges découverts.
La méthode retenue sur le tracé Hauts de France a consisté à travailler sur une bande de 4 m de largeur correspondant à l’emplacement de la tranchée de pose de la future conduite. Compte tenu du potentiel archéologique spécifique à la région, le diagnostic s’est réalisé en deux temps, d’abord sous la forme de tranchées peu profondes pour détecter les sites de surface, puis sous la forme de sondages profonds dans des secteurs ciblés, susceptibles de recéler des indices de sites préhistoriques plus profondément enfouis.
Quatre étapes peuvent être distinguées dans le déroulement du diagnostic ; elles ne sont pas interchangeables et se suivent toujours dans le même ordre :
- l’ouverture de la piste, qui comprend le piquetage des emprises, la mise en place des signalisations et l’éventuelle dépollution pyrotechnique (réalisée en 2012 sur une vingtaine de km dans la Somme et l’Oise) ;
- la réalisation des sondages par les équipes d’archéologues (ils doivent suivre un rythme d’avancement journalier d’environ 600 m linéaires) et leur relevé au GPS par un topographe. Chaque équipe est chargée de traiter 15 à 20 km ;
- le remblayage soigné qui doit respecter les engagements pris auprès de la profession agricole, puis la restitution des terrains ;
- la rédaction du rapport de diagnostic, avec une restitution des résultats dans un délai très court (6 à 8 semaines maximum).
Les fouilles
Quand la qualité des vestiges le demande, une seconde intervention, dite de fouille, peut être mise en œuvre sur un périmètre restreint. Elle se déroule nécessairement sur une durée réduite, à fortiori quand le chantier de pose est déjà engagé. Si bien que les équipes mobilisées doivent être nombreuses ; 5 à 8 fouilles se sont parfois déroulées concomitamment, avec des moyens humains et des ressources logistiques dispersés tout au long du tracé du gazoduc Hauts de France. Cette organisation exige une parfaite coordination technique et de calendrier entre les équipes de l’Inrap, le maître d’ouvrage GRTgaz et les entreprises réalisant la construction.
En deux temps
Quinze années (1997 – 2012/2013) séparent les deux opérations archéologiques menées sur les artères Hauts de France, auxquelles se sont ajoutées deux interconnexions situées aux extrémités du tracé, à Pitgam et à Cuvilly. Cet intervalle a permis de mesurer les avancées techniques de la recherche archéologique et tous les avantages de la professionnalisation accrue, avec des équipes d’archéologues rompues à travailler dans un cadre où la vitesse d’exécution et la réactivité sont primordiales. Cette adaptation contredit l’image traditionnelle de l’archéologue qui prendrait tout son temps.
Les deux opérations permettent aussi de mesurer les avancées de la recherche régionale, les travaux sur les deux gazoducs ayant chacun apporté leur lot de découvertes et d’informations scientifiques. À ce titre, elles participent pleinement à la connaissance des civilisations qui se sont succédées sur le territoire des deux régions de Picardie et du Nord-Pas de Calais.