Photogrammétrie
La technique de lever photogrammétrique a connu en quelques années des progrès significatifs. Il est maintenant possible de calculer des modèles tridimensionnels de manière presque entièrement automatique à partir d’images numériques.

Mise en évidence d’une succession de décapages au sein de la sépulture.
Le Mas rouge-La Cavalade, Montpellier (Hérault), 2013.
© Maxime Seguin, Inrap.
Le Mas rouge-La Cavalade, Montpellier (Hérault), 2013.
© Maxime Seguin, Inrap.
Dans de nombreux domaines et notamment ceux de l’archéologie, la photogrammétrie numérique est devenue une alternative à l’utilisation des scanners laser. C’est un moyen simple et facile à mettre en œuvre, qui permet d’effectuer des levers précis de structures complexes ou difficiles d’accès.
La photogrammétrie est la technique qui a pour but de déterminer les dimensions, les positions et la forme d’objets, à partir de clichés photographiques. Elle est née avec l’apparition de la photographie. Aujourd’hui, il existe de nombreux logiciels qui permettent de traiter les acquisitions photographiques. La solution retenue dans le cadre des opérations archéologiques liées aux projets de Contournement ferroviaire de Nîmes et Montpellier et déplacement de l’autoroute A9 à Montpellier est un logiciel développé par l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN). Celui-ci a l’avantage d’être libre et conçu pour un usage scientifique.
L’acquisition des images numériques suit un protocole précis, qui est directement contraint par les principes théoriques de la photogrammétrie : les images doivent d'une part être prises parallèlement à la surface de l’objet que l’on souhaite restituer et d’autre part se chevaucher. Ceci permet d’obtenir des couples d’images stéréoscopiques. Sur chacune de ces images, des points dits « homologues » correspondent à des détails de l’objet photographié. En mesurant la position de ces points dans les images, il est possible de déterminer leur position dans l'espace. L'utilisation d’algorithmes de traitement d’image et l’exploitation de certaines propriétés géométriques permettent alors de générer automatiquement des nuages de points denses par corrélation d’images.
Cette technique a été utilisée de manière systématique pour la fouille de la sépulture collective néolithique du « Mas Rouge/La Cavalade » à Montpellier. En effet, le contexte et les caractéristiques de la structure nous ont amenés à privilégier une méthode d’enregistrement permettant une acquisition rapide et exhaustive. Les objectifs étaient d’enregistrer en trois dimensions, de manière fiable et systématique, tous les restes humains et les artefacts. Un lever photogrammétrique a également été réalisé à propos de la sépulture néolithique du site de Joncante à Codognan.
Le procédé a permis, pour chaque étape du dégagement, de produire une orthophotographie. Vingt levers photogrammétriques ont été réalisés au cours de cinq mois de fouille. Au total, ce sont plusieurs milliers de clichés photographiques qui ont été acquis lors de cette campagne de fouille. Les documents produits ont été géoréférencés. Cela a nécessité la mesure par tachéométrie de cibles positionnées sur la structure. Un lever global de la structure entièrement dégagée a également été réalisé à la fin de la fouille.
Un nuage de points global a été généré à partir des images. C’est à partir de ce nuage que des coupes ont pu être produites à la demande. L’intérêt de disposer d’un modèle tridimensionnel de la structure est de pouvoir produire ces coupes à l’endroit souhaité.
L’orthophotographie est un document qui apporte un niveau d’information supplémentaire à un plan. C'est en effet une photographie rééchantillonnée, pour laquelle la position d’un point dans l’image est directement liée à la position d’un détail sur le terrain. Tout comme le plan, elle peut être enrichie d’autres informations : courbes de niveau, contours, etc. À la différence du lever manuel son processus de production est exempt de toute interprétation humaine. L’interprétation et l’exploitation archéologique interviennent une fois le document produit. L’aspect esthétique du document en fait également un excellent support de publication et de communication.
La densité d’un nuage de points et la résolution de l’orthophotographie sont directement liées au type d’appareil photographique utilisé. Les parties non visibles ne sont évidemment pas modélisables, mais les parties vues de manière rasante ne sont également pas propices à un résultat correct.
Ces quelques remarques illustrent les limites de cette technique, qui présente toutefois le net avantage de pouvoir s’affranchir de bien d’autres contraintes inhérentes au dessin manuel traditionnel. En effet, la technique du lever photogrammétrique est à l’origine de levers denses et à la très grande précision. Cependant l’exactitude et l’exhaustivité ne sont pas des fins en soi. Les orthophotographies et les nuages de points ne sont que des supports de travail qu’il est très souvent impératif de compléter par des levers manuels. Ces deux techniques sont donc complémentaires et il n’y a pas lieu d’opposer le lever manuel et lever numérique. Au final, l’existence de logiciels libres et le faible coût des appareils photographiques numériques augurent une démocratisation de cette technique dans le domaine de l’archéologie. À terme, cette méthode pourrait être utilisée de manière régulière sur d’autres chantiers de ce type.
Maxime Seguin
- Nuage de points du volume de la cave en fin de fouille (cave réutilisée ensuite comme sépulture).Le Mas rouge-La...Nuage de points du volume de la cave en fin de fouille (cave réutilisée ensuite comme sépulture).Le Mas rouge-La Cavalade, Montpellier (Hérault), 2013.© Maxime Seguin, Inrap.
- Coupe du nuage de points selon un plan vertical. Le Mas rouge-La Cavalade, Montpellier (Hérault), 2013. © Maxime Seguin,...Coupe du nuage de points selon un plan vertical.
Le Mas rouge-La Cavalade, Montpellier (Hérault), 2013.
© Maxime Seguin, Inrap. - Ombrage numérique du nuage de points. Le Mas rouge-La Cavalade, Montpellier (Hérault), 2013. © Maxime Seguin, Inrap.Ombrage numérique du nuage de points.
Le Mas rouge-La Cavalade, Montpellier (Hérault), 2013.
© Maxime Seguin, Inrap. - Mise en évidence d’une succession de décapages au sein de la sépulture.Le Mas rouge-La Cavalade, Montpellier...Mise en évidence d’une succession de décapages au sein de la sépulture.Le Mas rouge-La Cavalade, Montpellier (Hérault), 2013.© Maxime Seguin, Inrap.