Antiquité grecque

Buste d'Athéna, fouille de l'esplanade de la Major.
© CCJ, AMU, CNRS
© CCJ, AMU, CNRS
Vers -600, des marins grecs venus de Phocée (aujourdhui en Turquie) établissent un comptoir, quils nomment alors Massalia, sur une bande de terre adossée à la mer au sud (crique) et à louest. Vers lintérieur des terres, trois collines et un promontoire rocheux occidental marquent le paysage de la cité et vont conditionner son urbanisation : les buttes Saint-Laurent, des Moulins et des Carmes, et le promontoire Saint-Jean. Fondant sa puissance sur le commerce, Massalia prend rapidement de lampleur et devient lun des plus grands ports de Méditerranée.
Trois collines, un promontoire rocheux et des temples grecs
Dès la fin du VIe siècle avant notre ère, la ville sétend jusquà la butte des Carmes, qui se situe alors en dehors des murs denceintes. Elle est sans aucun doute pourvue des nombreux monuments qui symbolisent lâme des cités grecques, mais aucun nest pas parvenu jusquà nous, ou tout du moins na été découvert. Leurs emplacements ne nous sont connus que par les évocations quen ont laissées les auteurs antiques, notamment le géographe grec Strabon et lhistorien romain Justin.
La butte des Moulins, la plus haute des trois collines (42 m au-dessus du niveau de la mer), abritait peut-être lacropole (« ville haute » des cités grecques, comportant souvent des sanctuaires). À son sommet se dressait possiblement le temple dAthéna Polias.
Les temples dArtémis dÉphèse et dApollon Delphinien auraient été bâtis le long du promontoire rocheux occidental (actuellement entre le fort Saint-Jean et la cathédrale de la Major).
Enfin lagora, place publique qui correspond au centre administratif, politique, judiciaire et économique de la cité, pourrait avoir été située entre la butte Saint-Laurent et celle des Moulins, vers lactuelle place de Lenche.
La butte des Moulins, la plus haute des trois collines (42 m au-dessus du niveau de la mer), abritait peut-être lacropole (« ville haute » des cités grecques, comportant souvent des sanctuaires). À son sommet se dressait possiblement le temple dAthéna Polias.
Les temples dArtémis dÉphèse et dApollon Delphinien auraient été bâtis le long du promontoire rocheux occidental (actuellement entre le fort Saint-Jean et la cathédrale de la Major).
Enfin lagora, place publique qui correspond au centre administratif, politique, judiciaire et économique de la cité, pourrait avoir été située entre la butte Saint-Laurent et celle des Moulins, vers lactuelle place de Lenche.
Un développement urbain important
Lexemple des fouilles de la rue Leca, réalisées au nord de la ville, dans un secteur situé en contrebas de la Vieille-Charité, témoigne dun développement urbain loin du centre de la cité. Le site révèle ainsi, dès le Ve siècle avant notre ère, la présence de fours de potiers sans doute destinés à la production damphores et définissant, déjà pour cette époque, un espace périurbain dédié à lartisanat. Vers le milieu du siècle suivant, un nouveau quartier se développe à cet emplacement. Un établissement thermal y est édifié ; il sera remplacé, au IIe siècle avant notre ère, par des maisons dhabitation, témoignant une nouvelle fois de limportance de lextension de la cité

Vue des vestiges daménagements du rivage repérés lors de la fouille de la Consigne sanitaire. Dans l'angle supérieur gauche, des rondins forment une cale de halage.
© N. Weydert, Inrap
© N. Weydert, Inrap
Dans un autre registre, la découverte de traces dexploitation agricole (dont des vignobles) permet de se faire une meilleure idée de létendue du territoire massaliète au-delà des limites de la cité proprement dite : dabord dans les zones périurbaine, aux abords immédiats de la ville, notamment sur la colline Saint-Charles, ou encore dans les faubourgs de lAlcazar, rue Trinquet et République nord. Lobservation de ces terrains cultivés nous mène parfois très loin du cœur de la cité, par exemple vers le site de Saint-Jean-du-Désert, situé au moins à 5 kilomètres du Vieux-Port.
Le port, poumon économique de la cité phocéenne
Dans le quartier de la mairie, plusieurs vestiges du port grec ont été mis au jour. Il sagit notamment dun quai daté du VIe siècle avant notre ère, dégagé lors de la fouille de la place Villeneuve-Bargemon et qui semble correspondre à la plus ancienne structure portuaire connue dans la cité (il pourrait en fait sagir dun môle portuaire). Un autre quai et les épaves de deux embarcations construites vers -550 ont été découverts place Jules-Verne dans un état de conservation exceptionnel, ainsi que des cales sèches utilisées pour lentretien des navires de guerre, sous la place Villeneuve-Bargemon.
Un bâtiment important, dont les traces ont été repérées sous lactuelle place de Lenche, dans les caves du monastère Saint-Sauveur qui lavaient occulté (doù son nom de « caves Saint-Sauveur »), pourrait correspondre à un édifice public remontant au IIe siècle avant notre ère. Il est généralement interprété tantôt comme un lieu de stockage.
- Trois blocs de travertin (milieu du IVe siècle avant notre ère) appartenant à un môle qui protégeait le port de la cité grecque.À gauche, trois blocs de travertin mis en place vers le milieu du IVe siècle avant notre ère et appartenant...À gauche, trois blocs de travertin mis en place vers le milieu du IVe siècle avant notre ère et appartenant à un môle qui protégeait le port de la cité grecque.
Ces structures ont été découvertes à l'occasion d'une surveillance archéologique de travaux d'aménagement menés rue de la République à Marseille.
© N. Weydert, Inrap - Fragments de céramiques attique, corinthienne (VIe-Ve siècles avant notre ère).Fragments de céramiques attique, corinthienne et locale issus des niveaux d'époque grecque archaïque...Fragments de céramiques attique, corinthienne et locale issus des niveaux d'époque grecque archaïque (VIe-Ve siècles avant notre ère).
Fouille du collège Vieux Port.
© N. Weydert, Inrap
Un peu plus loin, le site du collège Vieux-Port met en évidence la présence des premiers quartiers dhabitations (vers -570/-560) situés aux abords du port. Il inclut notamment un vaste édifice évoquant des salles de banquet. Avec les nombreuses découvertes réalisées dans le reste de la ville (parvis Saint-Laurent, tunnel de la Major, parking République...), il témoigne des débuts de lurbanisation massaliète qui se développe autour du port. Le site de la place Villeneuve-Bargemon a également livré les restes dun atelier monétaire daté du IIe siècle avant notre ère, confirmant limportance de cette cité qui « frappait » ses propres monnaies.
La plus grande cité grecque dExtrême-Occident
Entre traces agricoles et vestiges de murailles, de complexes religieux, dinfrastructures portuaires, dhabitations, de nécropoles (voir la fiche de résultats consacrée aux espaces funéraires), on peut donc sans hésitation dire aujourdhui que Marseille nest pas cette ville « antique sans antiquités » que décrivait au XIXe siècle lécrivain marseillais Joseph Mery.
Connue dAristote, qui avait rédigé vers -350 une Constitution des Marseillais aujourdhui disparue, la cité phocéenne était suffisamment puissante pour posséder son propre temple (le « Trésor des Marseillais ») dans le fameux sanctuaire de Delphes, en Grèce. Massalia fut la plus importante cité grecque de lExtrême-Occident, où vivaient sans doute des milliers dhabitants.
Connue dAristote, qui avait rédigé vers -350 une Constitution des Marseillais aujourdhui disparue, la cité phocéenne était suffisamment puissante pour posséder son propre temple (le « Trésor des Marseillais ») dans le fameux sanctuaire de Delphes, en Grèce. Massalia fut la plus importante cité grecque de lExtrême-Occident, où vivaient sans doute des milliers dhabitants.
Laurent Ribadeau Dumas