Synthèse par thèmes

Les objets de la vie quotidienne à l’époque gauloise

Un autre regard sur l’artisanat et le commerce de Cenabum

Les objets gaulois mis au jour lors des fouilles (outils, parures, monnaies, armes…) offrent de mieux connaître la vie quotidienne des populations de l’époque. Remis en perspective dans des assemblages d’objets et en relation avec leur contexte de découverte, ils apportent un témoignage sur le statut des habitants d’Orléans-Cenabum au cours des IIe et Ier siècles avant notre ère. Ils renseignent aussi les archéologues sur l’artisanat, sur les échanges économiques et, donc, sur la place tenue par Cenabum au sein du territoire gaulois.

Les productions

Ces objets se présentent parfois sous une forme peu perceptible. C’est notamment le cas pour les indices du travail du métal : tiges, coulures, chutes découpées… Ils semblent peu dignes de figurer dans les collections des musées ! Pourtant, ces petits fragments révèlent une importante production du métal, en particulier du bronze, dans plusieurs secteurs de la ville gauloise (voir les sites « Îlot de la Charpenterie » , « Place de Gaulle » , « Place du Châtelet » et « Place du Cheval Rouge »). Des outils ou instruments caractéristiques de ce type d’artisanat complètent les découvertes : creusets, moules (pour la fonte à la cire perdue), polissoirs en pierre volcanique ou poinçons, utilisés pour les finitions. Grâce aux objets abandonnés en cours de fabrication, nous savons que les artisans de Cenabum fabriquaient, entre autres choses, des fibules.

Deux éléments indiquent une production de monnaies dans l’oppidum carnute : d’une part, une très grande quantité de pièces coulées (les potins) et frappées d’un aigle, symbole du pouvoir émetteur ; d’autre part, deux flans monétaires en cours de fabrication (ils étaient encore collés l’un à l’autre).

Enfin, plusieurs objets attestent une activité textile. Il s’agit d’éléments liés au filage (fusaïoles et dévidoirs) et de parties de métiers à tisser (comme les pesons). L’ampleur de cet artisanat est difficile à évaluer, mais il peut s’agir de produits destinés à être commercialisés au-delà de la sphère domestique.
Pesons de métier à tisser en terre cuite, époque gauloise.
Les pesons sont utilisés pour assurer la tension des fils sur un métier à tisser vertical.
Îlot de la Charpenterie, Orléans (Loiret), 1999.
© Thierry Massat

Une place commerciale notable

Les quantités de métal retrouvées à Orléans, bien supérieures à celles des autres agglomérations de la région à la même période, témoignent de l’intense production artisanale de l’occupation gauloise. Pour autant, il s’agit très certainement d’un artisanat à diffusion locale, limitée à la ville, très peuplée, et à ses abords. 

Il en va de même pour la production monétaire : 90% des découvertes identifiées appartiennent à des séries monétaires circulant principalement autour d’Orléans. Ceci indique que le pouvoir émetteur est fort et contrôle économiquement et politiquement le territoire de circulation.
La grande quantité de pièces étrangères observée parmi les découvertes monétaires atteste l’insertion d’Orléans dans un vaste réseau d’échanges, parfois à très longue distance, ainsi que la présence de voyageurs, marchands étrangers ou mercenaires. Dans ses Commentaires sur la guerre des Gaules, César mentionne la présence de marchands romains (VII, 3), ce que semble confirmer la présence d’une trentaine de monnaies républicaines. Vingt-trois monnaies ont des provenances encore plus éloignées : Syracuse en Sicile, Grèce… 

La présence des élites

Orléans-Cenabum est décrite comme la place principale des Carnutes par César. La présence d’objets considérés comme des marqueurs de statut privilégié tend à confirmer cette mention. 

En effet, les fragments d’équipement militaire témoignent de la présence d’élites guerrières, alors à la tête des peuples gaulois. Les instruments d’écriture (comme les styles) ou des parures de provenance étrangère (par exemple, les bagues à intaille) révèlent l’existence de personnages cultivés ayant adopté des objets ou des coutumes venus du monde méditerranéen. Il peut s’agir des mêmes élites guerrières, ou bien de marchands, gaulois ou romains.

Les monnaies complètent, encore une fois, ces observations et permettent de confirmer la présence dans la cité d’un pouvoir politique fort. 
Emilie Roux