optimised3

105 rue Saint-Roch

Vases tournés de tradition indigène (gaulois).Assemblage des pots recueillis dans le fond du puits PT73. Au premier plan figure une cruche à pâte claire massalliète, trouvée dans le niveau supérieur du puits.105 rue Saint-Roch, Toulouse (Haute-Garonne), 2007-2008.  © O. Dayrens, Inrap
Vases tournés de tradition indigène (gaulois).
Assemblage des pots recueillis dans le fond du puits PT73. Au premier plan figure une cruche à pâte claire massalliète, trouvée dans le niveau supérieur du puits.
105 rue Saint-Roch, Toulouse (Haute-Garonne), 2007-2008.
© O. Dayrens, Inrap

Description

La fouille réalisée au 105 rue Saint-Roch, à Toulouse, s'inscrit dans une zone archéologique sensible reconnue dès le XVIIIe siècle. Le terrain, exploré sur une surface de 450 m², avait préalablement été expertisé en 2006. L'occupation gauloise dans ce secteur de la plaine Saint-Roch, localisée au sud du centre urbain de Toulouse, est la mieux documentée. Elle s'étend sur une aire d'environ une centaine d'hectares, bordée par la Garonne à l'ouest. Il est admis aujourd'hui que cet espace a accueilli une agglomération de plaine et a été à l'origine de la Tolosa antique dont le développement s'est produit à l'emplacement du centre-ville actuel.

Résultats

La période protohistorique

Six grandes phases d'occupation humaine ont été caractérisées sur le site, couvrant un millénaire depuis la Protohistoire jusqu'à la fin de l'Antiquité et totalisant 90 faits archéologiques identifiés. Des fosses et des empreintes de poteaux dans le sol révélant une aire d'habitat datée de la fin de l'âge du Bronze, soit vers le VIIIe siècle avant notre ère, sont les traces les plus anciennes sur le site. Après un hiatus de 600 ans, le site est à nouveau occupé à la fin du second âge du Fer, la période la mieux documentée. 

Trois réaménagements se sont succédé pendant plusieurs décennies sur cet îlot bordé de fossés. Cette occupation dense, qui débute au dernier tiers du IIe siècle avant notre ère, semble se développer sans interruption jusque vers le milieu du Ier siècle avant notre ère, soit sur une période de 70 ans. Des activités domestiques et artisanales ont été relevées. Les traces de bâtiments dont l'usage n'est pas caractérisé sont illustrées par des niveaux de sols, ainsi que des traces de calages ou creusements de poteaux pour la première période, tandis que la période suivante regroupe essentiellement des fosses profondes ou des puits à eau. L'un des cinq puits fouillés a fourni plusieurs vases entiers ainsi que des amphores complètes dans le dépôt primaire, en partie immergés dans la nappe phréatique. Un niveau de circulation caractérise la fin des occupations gauloises sur le site et semble répondre à de nouveaux besoins. Des empreintes de cloisons délimitant un bâtiment de plan quadrangulaire ont été identifiées. 

Ce type d'aménagement a également été reconnu sur les fouilles réalisées dans le quartier Saint-Roch. Les lieux semblent ensuite être inoccupés quelques temps, avant un réaménagement total du secteur (remblaiement et nivellement) intervenu dans la seconde moitié du Ier siècle avant notre ère. Le parcellaire a sans cesse évolué, modifiant l'organisation des îlots, conséquence directe d'une contrainte d'origine naturelle liée au ruissellement des eaux qu'il a fallu régulièrement canaliser. 

Le mobilier recueilli, notamment les amphores d'origines diverses (Italie, Grèce, Espagne, rhodiennes et tripolitaine) ayant transporté du vin et de l'huile, révèlent des échanges et des liens commerciaux inédits. De la céramique fine d'importation italique (campanienne A), ibérique et du Sud de la Gaule, associée à un échantillonnage conséquent de récipients de facture indigène, ainsi que des éléments remarquables, comme des objets en céramique ou métalliques (quincaillerie, parures), accompagnent ce matériel.

La période gallo-romaine

Les fondations de plusieurs monuments funéraires, bordés par un fossé parallèle à l'actuelle rue Saint-Roch, caractérisent principalement l'occupation gallo-romaine. La construction la plus imposante, interprétée comme un mausolée, est conservée sur une hauteur de 0,50 m et mesure 3,50 m de côté. Les traces d'un emmarchement en brique (côté chaussée) et des fragments de marbre témoignent de la qualité de l'ouvrage. L'environnement funéraire est confirmé par la présence de plusieurs incinérations groupées à peu de distance au pied de ce monument.

Les vestiges d'une voierie antique comportant des empreintes d'ornières et constituée de galets de la Garonne ont été identifiés du côté est. Étant donné l'arasement important des lieux, qui a causé la destruction et l'enlèvement de tous les remblais antiques à cet endroit, le mobilier potentiellement associé à ces vestiges est rare. Néanmoins, on peut proposer une datation pour l'installation de cet ensemble entre la période augustéenne et le courant du Ier siècle de notre ère. L'abandon des lieux, avec notamment, le démontage des monuments, intervient au Bas-Empire. Le fond d'une inhumation installée dans l'axe du fossé bordier antique pourrait appartenir au cimetière mentionné encore sur un plan cadastral du XVIIIe siècle.

Depuis l'installation des premiers mausolées du Haut-Empire, dont le plus important se trouve sous l'actuelle église Saint-Roch située à quelques dizaines de mètres au nord du site, nous constaterons que les lieux ont gardé un caractère funéraire concentré dans l'environnement actuel des rues Saint-Roch et de la rue du Férétra. Cette fouille a ainsi offert l'opportunité de confirmer l'extension de l'occupation gauloise semi-urbanisée de la plaine Saint-Roch au nord et d'apprécier ce qu'était cette zone périurbaine de l'entrée sud de Toulouse antique, le long d'un axe pouvant être interprété comme étant la voie Narbonnaise, identifiée en bordure de l'actuelle rue Saint-Roch.

Jean-Jacques Grizeaud