Synthèse par thèmes

Mourir à Toulouse depuis de l’âge du Fer au Moyen Âge

La problématique des puits, interprétés à tort comme funéraires, a longtemps nui à la recherche sur les pratiques funéraires gauloises dans le Midi toulousain. 
Plan de localisation des principales découvertes funéraires au sud de Toulouse par rapport à l’emplacement de la ville antique et au tracé probable de la voie narbonnaise. 1/ « impasse Augustin Thierry - rue Achille Viadieu » ; 2/ « chapelle Saint Roch » ; 3/ « caserne Niel » ; 4/ « 101 du chemin de la Salade-Ponsan »

Où sont les morts gaulois ?

L’évolution de cette question et le déficit de tombes pour cette période conduisent à nous interroger sur la façon dont les Gaulois s’occupaient de leurs morts (traitement funéraire et destination finale de leurs restes). Excepté la découverte remarquable du 51, rue Saint-Roch, datée de l’articulation des IIe et Ier siècles avant notre ère, qui est la seule sépulture gauloise identifiée à Toulouse à ce jour, il n’existe ailleurs que de rares squelettes, pour lesquels la volonté d’effectuer un geste funéraire n’a de surcroît pas été caractérisée. La crémation, aussi poussée soit-elle, ne faisant pas disparaître les entièrement les os, les restes des ossements humains pourraient avoir été disposés de façon éparse dans l’habitat.

Une grande nécropole antique le long de la voie Narbonnaise ?

Hormis les sites du Métro François-Verdier et de l’École d’Économie, les seuls ensembles conséquents explorés avec méthode à l’est et au nord-ouest de la ville antique, la plupart des découvertes funéraires ont été réalisées au sud. Les morts, rejetés hors de l’espace de la ville, sont alors rassemblés le long de la voie Narbonnaise, à l’instar de Rome où les sépultures étaient disposées le long de la voie Appienne. Cette hypothèse de l’existence d’une grande nécropole, qui induit une image idéale et magnifiée de Toulouse antique, est aujourd’hui relativisée. L’installation de différentes nécropoles, composées d’un ou de plusieurs pôles strictement séparés, pourrait également se concevoir. 

Les structures funéraires

La question du choix entre inhumation et crémation semble se poser à Toulouse aux alentours de la fin du IIe siècle de notre ère. Le passage d’une pratique à l’autre est observable sur les sites de la station de Métro François-Verdier et de l’école d’économie.

À Toulouse, les structures utilisées sont de divers types. Pour les plus jeunes, c’est souvent  l’amphore qui est employée. Les fosses couvertes, parfois anthropomorphes durant le Moyen Âge, sont d’un usage très développé jusqu’au XIIIe siècle, tout comme les coffrages de bois. Pour des raisons de géologie locale, les seuls éléments solides utilisés pour l’élaboration d’une tombe sont les galets calcaires, les tegulae et les briques. À partir du XIIIe siècle, les sépultures « en pleine terre » prennent le relai, ainsi que le cercueil, qui avait disparu au VIe siècle.

Pour les plus riches, on utilise des sarcophages, pour la plupart importés et souvent réutilisés, ainsi que des caveaux en briques. Nous avons peu d’exemples de coffres en plomb antique, sauf sur le site de l’École d’Économie de Toulouse et près de la basilique Saint-Sernin (fouille du Musée Saint-Raymond).

Les lieux d’inhumation païens et du début du christianisme

En ce qui concerne les lieux d’inhumation, rappelons que le paysage funéraire antique est constitué de « nébuleuses » pouvant se rejoindre, voire se superposer, et qui s’étirent sur les principales voies d’accès qui entourent la ville antique sur trois côtés (fig. 2).

Il faudra attendre la construction de la memoria destinée à saint Saturnin (ou Sernin) pour voir se développer un cimetière, créant une première « communauté des morts ». D’autres inhumations sont associées à l’église Saint-Pierre des Cuisines, le mot « cuisine » ou culina pouvant signifier « tombeau des pauvres », d’après le Gromatici veteres (Ve siècle). Malgré les interdits du droit romain, des tombes sont aménagées dans une friche urbaine de la cité durant les VIe et VIIe siècles (métro Carmes), signe d’une réduction de la surface habitée. Les Goths demeurent donc dans une certaine « discrétion » archéologique, même si le site de l’École d’Économie a permis d’observer une partie d’un probable mausolée érigé pour un souverain. 

D’une manière générale, les cimetières médiévaux les plus anciens se situent hors de la cité (fig. 3). Certains sont d’abord fondés pour les étrangers et les pauvres, comme celui du Château Narbonnais. D’autres sont ensuite créés à l’intérieur des remparts, lorsque la paroisse intra muros est subdivisée et que les institutions religieuses entrent en ville, comme les Hospitaliers. On voit ainsi, à partir du XIIIe siècle, une multiplication des lieux d’inhumation, parfois de très petite taille, afin de répondre aux besoins funéraires d’une ville en pleine expansion démographique.

Patrice Georges-Zimmermann, Didier Paya, Sylvie Duchesne, Fabienne Landou