Le jeu de paume de Rennes

À Rennes, la situation à la fois proche mais extra-muros des faubourgs a constitué, au XVIIe siècle, un emplacement privilégié pour la construction de plusieurs jeux de paume. Ainsi le quartier Saint-Aubin, au nord de la ville, n’en comptait-il pas moins de six, dont la salle du Pélican. La paume était un sport alors à son apogée, qui générait des rassemblements importants et mêlait toutes les classes sociales. Cette promiscuité a d’ailleurs terni l’image du jeu, et les tripots (autre dénomination des lieux où se pratiquait le jeu de paume) ont rapidement été assimilés à des lieux de débauche.     

Édifiée dans la première décennie du XVIIe siècle, à deux pas de l’actuelle place Sainte-Anne, la salle du Pélican n’aurait laissé aucun souvenir si elle n’avait été redécouverte en 2011 par Élodie Baizeau, architecte du patrimoine, et la société Dendrotech, spécialisée dans la dendrochronologie et l’étude des charpentes. À la fin du XVIIe siècle, en effet, la pratique du jeu est délaissée. Le bâtiment, devenu la propriété de l’évêché de Rennes en 1686, est intégré à un ensemble à vocation religieuse, dit Grand Séminaire. La salle de jeu est transformée en chapelle : on remonte à cette occasion le pignon sud, on édifie un transept matérialisé par deux extensions et la charpente reçoit une voûte lambrissée. À la Révolution, le Grand Séminaire devient hôpital militaire, et sa chapelle un lieu de stockage et de lingerie avant d’être dédiée au logement des religieuses. Récemment encore, l’ancienne salle accueillait des bureaux.   

Les caractéristiques architecturales du jeu de paume ont donc permis de faire évoluer le bâtiment au cours des siècles en l’adaptant à de nouveaux besoins sans que sa démolition ne soit pour autant envisagée. À travers l’étude du bâti menée en 2014, l’enjeu principal a consisté à retrouver les dispositions anciennes de la salle du Pélican, qui est à ce jour, avec celle de Chinon, une des plus anciennes salles de jeu de paume conservées en France. Si le volume d’origine est encore parfaitement perceptible, les recherches des archéologues ont permis de restituer les parties disparues et d’appréhender l’organisation primitive de l’édifice, avec ses galeries hautes et basses, son mur de bricole…     

Parallèlement, une recherche dans les archives de la ville a indiqué que les propriétaires successifs de la salle du Pélican appartenaient à de grandes familles de parlementaires rennais, ce qui souligne que le jeu de paume était aussi une activité lucrative. La redécouverte de ces espaces de loisirs tempère un peu l’image pieuse du quartier, portée notamment par le couvent des Jacobins, où le culte à Notre-Dame de Bonne Nouvelle est également à son apogée au XVIIe siècle.