L’église Saint-Pierre-du-Marché et sa nécropole

Par son vocable (nom d’une église évoquant la protection d’un saint particulier) qui révèle souvent une origine très ancienne, et par sa localisation au-devant de la porte principale de la cité au Moyen Âge, ce lieu de culte est l’un des plus intéressants de la ville. Toutefois les renseignements à son sujet sont pour l’instant uniquement fournis par des mentions de découvertes fortuites remontant principalement au XIXe siècle. C’est en les confrontant aux sources anciennes que l’on a pu déduire que cette église, l’une des plus anciennes de Rennes, entourée par son cimetière se situait vers le haut de l’actuelle place de la Mairie.

L’église Saint-Pierre-du-Marché

La date d'édification de cette église, dont aucun vestige n’a pour l’instant été retrouvé, n'est pas connue. Cependant son nom, qui mentionne sa proximité du marché de la ville, situé « hors les murs », plaide en faveur d’une grande ancienneté.

L’édifice remonterait au moins au Xe siècle. Un écrit hagiographique médiéval relatif à la vie de l’évêque saint Melaine, rapporte qu’à cette époque (au Xe siècle) il dépend de l’abbaye du même nom. Sa localisation est précisée dans le cartulaire de l’abbaye Saint-Georges, à laquelle l’église Saint-Pierre-du-Marché est rattachée à partir du XIe siècle : « in suburbio Redonis ante portam civitatis magnam », c’est-à-dire dans le faubourg de la ville, devant la grande porte de la cité. En raison de son délabrement l’édifice est détruit au XIIIe siècle.

 Cette période de l’histoire de Rennes est très mal connue du point de vue de l’archéologie. Aussi les informations que l’on peut tirer de la confrontation de ces données sont-elles fort intéressantes pour tenter de brosser un rapide tableau de la physionomie de la ville à cette époque.

Les vestiges du cimetière de Saint-Pierre-du-Marché

L’emplacement du cimetière est reconnu depuis le début du XIXe siècle. En 1832 en effet, des travaux de nivellement en vue de la construction du Théâtre ont occasionné la découverte de sépultures, dont on sait seulement quelles étaient constituées par des coffres de pierre. Puis en janvier 1882, lors de terrassements effectués rue de Brilhac, plusieurs cercueils en schiste ardoisier ont été exhumés. Mais on ne connaît même pas leur nombre. En 1897, lors de l’installation de la ligne de tramway au niveau de cette même rue, trois sépultures sont mises au jour : un sarcophage en calcaire coquillier rétréci vers les pieds et orienté est-ouest et deux coffres en plaques de schiste ardoisier.
 
Dans la région, ce type d’architecture funéraire – qui pose d’ailleurs la question de l’origine des matériaux utilisés – renvoie généralement au haut Moyen Âge ; on admet actuellement qu’il apparaît au plus tôt au cours du VIe siècle. L’emploi de tels contenants se prolonge dans certain cas jusqu’au VIIIe siècle, voire au-delà, en raison de réutilisations successives.

La fouille récemment menée au niveau de la station de la Place Saint-Germain a permis de découvrir des sépultures remontant au VIIe siècle dépourvues de coffres. Il s’agit probablement du secteur le plus méridional de la nécropole de Saint-Pierre-du-Marché.

La topographie urbaine de la fin de l’Antiquité et du début du Moyen Âge

Les fouilles montrent que, passé le milieu du IVe siècle, il ne reste rien du réseau de rues de la ville antique, jalonné par ses habitats de tradition romaine et ses monuments à la gloire de la cité et de l’empire. La dernière trace de la splendeur passée de Condate est le castrum édifié à la fin de l’Antiquité. On ne connaît presque rien de la vie qui se développe à l’intérieur de ces murs.
 
Les deux nécropoles de l’époque romaine, situées à l’est sur la colline du Thabor et au nord sur le coteau Saint-Martin, continuent à être utilisées malgré leur éloignement du noyau urbain. Ceci pose d’ailleurs la question de l’origine géographique des populations qui y sont inhumées.

En effet d’autres lieux d’inhumation plus proches des murs apparaissent à cette époque. Au nord-ouest, non loin des Portes Mordelaises, se trouve une église Saint-Étienne aujourd’hui disparue, entourée d’un cimetière dont quelques sépultures ont été mises au jour à l’angle des rues Saint-Louis et de Dinan. Sa situation au sortir du castrum permet de penser qu’elle accueillait majoritairement les défunts originaires de la zone intra-muros. Le site de Saint-Pierre du Marché, par sa position face à la grande porte de la ville, en bordure des itinéraires routiers importants venant de l’est et du sud-est, devait jouer le même rôle.

Dès lors il convient de se demander si les deux autres nécropoles, plus lointaines (colline du Thabor et coteau Saint-Martin), ne sont pas liées à l’existence de faubourgs dont l’archéologie n’a pas encore détecté les vestiges. Cette hypothèse rejoint les questions que les archéologues se posent quant à l’origine d’épaisses couches de « terres noires » recouvrant les vestiges d’époque antique que l’on rencontre dans de nombreuses villes. Leur interprétation comme étant des vestiges organiques d’occupations passées n’ayant pas laissé d’autres traces fait actuellement l’objet de débats.