Plan de localisation de la fouille.
Lycée Saint-Euverte, Orléans (Loiret), 1996.
© Hervé Herment, InrapDescription
Installé dans les anciens locaux de l'abbaye Saint-Euverte, le lycée du même nom a eu besoin de créer de nouveaux bâtiments. De précédents travaux menés en 1989 avaient déjà donné lieu à une fouille le long de la clôture sud-est de l'ancienne abbaye. Les aménagements de 1996, le long de la clôture sud, ont permis une seconde fouille, sur une surface d'environ 600 m2. Cette exploration a mis en évidence la présence de parcelles bâties encadrées par des voies durant les trois premiers siècles de notre ère, puis l'apparition de sépultures au Ve siècle et, enfin, l'intégration de cet espace dans l'abbaye Saint-Euverte au Moyen Âge.Résultats
Le Haut-Empire : un espace urbanisé
Alors qu'il était rural à l'époque gauloise, ce secteur d'Orléans est intégré à l'espace urbain dans les premières décennies du Ier siècle de notre ère. Un vaste programme de lotissement est alors mis en place sur le plateau dominant la Loire, au nord-est de l'agglomération protohistorique.
Sur le site, deux rues perpendiculaires sont construites. La rue est-ouest, large de 7 m, bute à l'est sur la rue nord-sud (large de 9 m), au-delà de laquelle elle ne se prolonge pas. Cet axe-ci se poursuit vers le nord pour déboucher sur une place importante marquant l'entrée de la ville.
Au carrefour des deux rues se distribuent des parcelles dont les emprises n'ont pas varié au cours des trois siècles suivants. Deux d'entre elles ont pu être partiellement étudiées. Chaque parcelle contient une maison, appuyée contre la rue nord, ainsi qu'un puits et des dépotoirs. Les habitations sont construites principalement en bois et en terre et décorées d'enduits peints ainsi que, pour l'une d'elles au moins, de mosaïque.
À la charnière des Ier et IIe siècles, les maisons sont reconstruites plus au sud, en dehors de la fouille. Seules ont pu être étudiées les cours, pourvues chacune d'une cave, d'un puits, de dépotoirs et de petites constructions aux fonctions mal identifiées.
Le Bas-Empire : une vocation funéraire
Les parcelles sont abandonnées au début du IIIe siècle pour l'une, un siècle plus tard pour l'autre. Les derniers bâtiments sont alors détruits, les matériaux récupérés, et l'espace recouvert d'une épaisse couche de terre végétale faisant également disparaître les voies. C'en est fini du découpage parcellaire antique.
Le secteur retrouve une position excentrée, en dehors de la ville qui s'enferme à l'intérieur du rempart dans la seconde moitié du IVe siècle. Le site devient un lieu d'inhumation au IVe-Ve siècle, probablement par l'extension d'une nécropole se développant depuis le IIe siècle plus au nord.
À partir du Moyen Âge : un établissement religieux
Après l'arrêt des inhumations sur le site, l'espace n'accueille plus de construction et semble rester en friche ou dévolu à des cultures. On ignore les motifs de cette transformation, mais il est possible qu'elle soit à mettre en relation avec une réorganisation profonde de l'espace funéraire, les inhumations étant désormais pratiquées de préférence à proximité de tombes de saints ou de saintes.
Or, à 100 m au nord du site, est attesté au IXe siècle l'oratoire supposément construit sur le tombeau de saint Euverte, évêque d'Orléans mort à la fin du IVe siècle. Cet oratoire se développe rapidement et devient une des plus importantes abbayes de la ville. L'église actuelle est construite dans la seconde moitié du XIIe siècle, le cloître dans les décennies qui suivent. Le site qui a été fouillé est lui-même intégré aux jardins de l'abbaye au plus tard au XIVe siècle.
Les bâtiments de l'abbaye, et notamment l'église, sont en partie détruits lors de la guerre de Cent Ans (1358-1428). Englobée dans la nouvelle enceinte, l'église est de nouveau endommagée lors des guerres de Religion (1562 et 1567). L'abbaye est finalement reconstruite à partir du XVIIe siècle. Des bâtiments se succèdent sur le site, encadrant un porche donnant accès à une place aujourd'hui disparue.
L'époque contemporaine : de l'église à l'école
L'abbaye est supprimée à la Révolution et ses bâtiments connaissent des affectations diverses jusqu'à ce que, à nouveau réunis sous l'autorité religieuse, ils accueillent un établissement scolaire catholique à partir de 1880.
Les bâtiments et le porche disparaissent dans la seconde moitié du XXe siècle, lors de la création d'une salle de classe. C'est cette dernière qui a été détruite en 1996 pour laisser place à une nouvelle construction.
Pascal Joyeux
Pascal Joyeux