Synthèses thématiques

Les verriers de Rennes

Une ville productrice

Condate figure parmi les villes où la production de verre est reconnue. Comme les autres artisanats recensés à Rennes, ces deux ateliers se trouvent dans le quartier nord-ouest de la ville. Les fouilles de la place Sainte-Anne et de l’allée Coysevox ont permis la mise au jour des fondations de plusieurs fours ainsi que de déchets liés à cet artisanat. Ce sont les seuls emplacements où l’activité verrière est avérée. Les mentions d’ateliers plus anciennes sont dues à des erreurs d’identification.

Le façonnage du verre

Au cours du Ier siècle, après l’invention et la généralisation du soufflage, la chaîne de production du verre est basée sur deux étapes principales : la production du matériau (verre brut) et le façonnage des pièces (récipients, objets de parure et verres à vitre).  

Le verre, premier matériau de synthèse créé par l’homme, est un mélange à base de silice, auquel on ajoute un fondant pour faciliter la fusion (le natron, carbonate de sodium qui se trouve à l’état naturel dans des lacs désertiques) et des oxydes (colorants ou décolorants). La fabrication du verre brut se fait dans des ateliers dits « primaires » situés en Syrie-Palestine et en Égypte, sur les zones riches en matières premières (sables adaptés et natron). Les grandes dalles de verre qui y sont produites sont débitées en blocs de 5 à 10 kg et acheminés vers les ateliers « secondaires » répartis dans tout l’empire romain. Ceux de Condate en font partie.

Les structures de chauffe

Sur la place Sainte-Anne et l’allée Coysevox, seules les parties enterrées des structures de chauffe ont été conservées. Elles correspondent aux fours servant à porter et maintenir le matériau brut à l’état liquide (autour de 1 100°C). À cette température, le verre est suffisamment fluide pour être déformé par soufflage dans un moule, ou à l’air libre en se servant de la gravité (soufflage dit « à la volée »). Pour atteindre la fusion, le verre brut est déposé dans des récipients en céramique (creusets, souvent des vases recyclés), qui sont placés sur la sole du four. 

Les fours de Rennes sont tous de forme circulaire, maçonnés en terre cuite (briques et tuiles réemployées). Grâce à l’iconographie romaine, on sait que les parties hautes se composent d’un dôme, dans lequel sont pratiquées des ouvertures qui servent au tirage d’air, mais aussi à vérifier l’état de fonte du verre. Le verrier utilise la plus grande ouverture pour venir prendre, dans les creusets, la quantité de verre nécessaire à l’objet qu’il va produire (on parle alors de « cueillir le verre »).

Les indices de production

En dehors des restes des fours, les archéologues découvrent généralement des petits fragments de verre qui viennent confirmer l’identification de l’artisanat. Il s’agit de petites billes, de fils très fins, de scories ou encore de résidus provenant de la fabrication des parties en verre filé (anses et décors). Ces derniers peuvent conserver les marques des outils utilisés par le verrier. À tous ces éléments, qui correspondent aux éclats qui peuvent sauter lors du façonnage et aux restes renfermant des impuretés, s’ajoutent des fragments fins et plats de récipients cassés ou ratés.  

Il faut, en effet, savoir que, dès les débuts de la production antique, le verre usagé ou brisé fait l’objet d’un recyclage systématique. Il existe même un système de ramassage des récipients cassés auprès des particuliers. Le recyclage offre un intérêt non seulement économique mais technique certain par rapport à l’emploi exclusif de verre brut, car il permet d’abaisser la température de fusion. Toutefois cette pratique présente un grand inconvénient pour les chercheurs : à cause du recyclage, il est impossible de savoir quels pouvaient être les types de récipients produits par les ateliers de verriers de Rennes…