Localisation des sites sur le territoire de Rennes

Métro Val ligne B, station Place Sainte-Anne

Vue zénithale d'une partie du cimetière médiéval en cours de fouille. La disposition des sépultures, toutes bien orientées, et leur promiscuité révèlent une gestion rigoureuse de l'espace funéraire, sans doute due au manque de place.  Station de métro Sainte-Anne ligne B, Rennes (Ille-et-Vilaine), 2013.  © Équipe de fouille, Inrap
Vue zénithale d'une partie du cimetière médiéval en cours de fouille. La disposition des sépultures, toutes bien orientées, et leur promiscuité révèlent une gestion rigoureuse de l'espace funéraire, sans doute due au manque de place.
Station de métro Sainte-Anne ligne B, Rennes (Ille-et-Vilaine), 2013.
© Équipe de fouille, Inrap

Description

Le site de la station de métro de la ligne B, Place Sainte-Anne a été fouillé sur une emprise de 945 m2. Plusieurs occupations ainsi que le système de voirie ont pu y être observés pour l'Antiquité. Peu de vestiges témoignent du début du Moyen Âge ; ils sont en revanche plus nombreux à partir du XIIe siècle, en particulier dans le domaine funéraire, avec le cimetière de l'église Saint-Aubin et de l'ancien hôpital Sainte-Anne , aujourd'hui disparus et localisés à l'ouest en dehors de l'emprise de la fouille.

Résultats

La découverte la plus remarquable est sans aucun doute celle d'un vaste bâtiment au sol de graviers soigneusement compacté et aux parois à ossature de bois, qui a précédé la mise en place de l'îlot ainsi que celle des chaussées.

Un énigmatique édifice monumental du début de l'Antiquité 

Dans la partie nord de la fouille les vestiges d'un important bâtiment ont été exhumés. Les limites de cette construction, large d'un peu plus de 7 m et longue d'au moins 35 m du nord au sud, ne sont pas connues car elle se développe au-delà du périmètre de la station. Ses caractéristiques, notamment le soin apporté à la réalisation du sol ainsi que la taille des poteaux, révèlent son caractère monumental. On peut penser que cet ouvrage a occupé une place prépondérante dans la ville naissante.

Deux hypothèses sont aujourd'hui retenues. Sa position au centre géographique de l'emprise urbaine du Haut-Empire, à proximité du temple découvert au couvent des Jacobins et de la porte monumentale élevée au IIIe siècle non loin de là, rue de Saint-Malo, suggèrent qu'il pourrait s'agir d'une partie du forum primitif des Riédons. L'autre hypothèse consiste à y voir les vestiges d'une partie du quartier général (principia) d'un camp militaire éphémère qui aurait joué un rôle important lors de la création de la ville.

L'édifice a été démantelé au début du Ier siècle et l'emprise ainsi libérée a ensuite été urbanisée.  

Un carrefour, des verriers, une riche demeure (Ier-IIIe siècles)  

Outre les vestiges d'un decumanus (rue orientée est-ouest), ceux d'un cardo (nord-sud), jusque-là inconnu, sont venus compléter le plan orthogonal de la ville antique. Ces deux axes étaient bordés de caniveaux coffrés de bois. À l'angle sud-ouest de leur carrefour se dressait un îlot construit, dont l'évolution entre le milieu du Ier et le début du IVe siècle a pu être étudiée. Jalonné d'étroites galeries portiques bordant des constructions à architecture de terre et de bois, il a d'abord accueilli une taverne ou une boulangerie, dont les fours circulaires posés à même le sol ont été retrouvés.  

Un atelier de verrier y fonctionne ensuite à partir de la fin du IIe siècle. Cette officine devait être assez importante et se développait sans doute sur une vingtaine de mètres de long en bordure du cardo. Mais seule la partie nord de l'atelier a été retrouvée et ses vestiges ne sont pas suffisamment bien conservés pour enrichir de manière notable les connaissances relatives à l'artisanat verrier.  

Sur le côté sud-est du site, les vestiges d'une vaste demeure urbaine (domus), sans doute occupée jusqu'à l'époque tardive (IVe-Ve siècles), ont été étudiés. L'une de ses salles au moins était dotée d'un chauffage par le sol (hypocauste). Sa taille relativement importante (20 m2) et sa disposition permettent de supposer qu'il s'agissait d'une salle d'apparat. Mais, le reste de l'habitation étant situé en dehors de l'emprise de la fouille, il est impossible d'en connaître le plan.

Six siècles de silence archéologique
 

À la fin de l'Antiquité, le site est démantelé, mais les modalités d'abandon de ce secteur n'ont pu être perçues.  

Dès le haut Moyen Âge (Ve-Xe siècles), ce quartier situé hors les murs semble être à nouveau occupé, mais seuls quelques rares trous de poteaux et tessons de céramique retrouvés dans la partie nord du site témoignent de cette époque.  

Ce n'est qu'à partir du milieu du Moyen Age (XIe-XIIIe siècles) que, situé au pied des fortifications, le secteur connaît un nouvel essor. Une rue d'orientation est-ouest scinde alors le site en deux. Des maisons dotées de caves et disposant de jardins à l'arrière jalonnent cette chaussée au nord. La moitié sud du site est occupée par le cimetière de la paroisse Saint-Aubin et de l'ancien hôpital Sainte-Anne, aujourd'hui disparus et localisés à l'ouest en dehors de l'emprise de la fouille.  

Un cimetière médiéval

Les tombes, orientées nord-ouest/sud-est, y étaient disposées en rangées, avec de nombreuses superpositions de sépultures sur une épaisseur maximale de 1,50 m. Cette organisation témoigne d'une gestion suivie des inhumations, avec des zones d'enfouissement et des espaces de circulation ; le développement en hauteur des tombes indique de probables limitations quant à l'extension géographique de la zone funéraire.  

Les sujets, déposés sur le dos, avaient la tête tournée vers le nord-ouest. Les modalités d'inhumations sont simples, en linceul ou encore en pleine terre. Aucun cas de cercueil n'a été identifié. Les défunts sont généralement enterrés sans signes distinctifs ni objets de valeur. L'échantillon total étudié montre une forte proportion d'enfants et une représentation de toutes les classes d'âge, ce qui est habituellement le cas dans un cimetière de type paroissial. Ce constat permet donc de supposer que ces lieux accueillaient à la fois les populations décédées à l'hôpital Sainte-Anne, mais aussi les paroissiens de l'ancienne église Saint-Aubin, contrairement à ce qui avait été envisagé initialement en raison de la localisation du cimetière.  

On sait que l'église Saint-Aubin et sa paroisse remontent au moins au XIIe siècle. Or toutes les datations par le radiocarbone (C14) entreprises sur plusieurs squelettes occupant des positions stratigraphiques différentes renvoient à une fourchette chronologique s'étendant de la fin du Moyen Âge (XVe siècle) au début de l'époque moderne (XVIe siècle). Aucun des défunts n'est en tout cas antérieur à la fondation de l'hôpital Sainte-Anne (1340). Cette zone funéraire pourrait donc relever d'une extension tardive du cimetière paroissial, ou bien encore les sépultures retrouvées ne correspondraient qu'à l'ultime phase de fonctionnement de ce dernier. Compte-tenu de l'espace relativement contraint qu'il occupe, celui-ci aurait pu faire l'objet de curages successifs, qui auraient fait disparaître les inhumations antérieures.  

Le cimetière disparaîtra à la fin du XVIe siècle lorsque la place Sainte-Anne sera créée. Quant aux maisons bordant la rue, elles seront abattues à la fin du XIXe siècle pour permettre la construction de l'actuelle église Saint-Aubin.