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L'Ouche Torse

Vue générale du chantier.  La villa antique se situe sur la gauche de la photographie, et l'occupation protohistorique, à droite.  L'Ouche Torse, Luxé (Charente), 2011.   © E. Bouchet, Inrap
Vue générale du chantier.
La villa antique se situe sur la gauche de la photographie, et l'occupation protohistorique, à droite.
L'Ouche Torse, Luxé (Charente), 2011. 
© E. Bouchet, Inrap

Description

Les origines antiques du bourg de Luxé, sur les rives de la Charente, sont attestées par plusieurs sites (sanctuaire, théâtre, port). Implantée au nord de Luxé, la villa de l'Ouche Torse était anciennement connue grâce à des prospections pédestres, et la fouille a permis de confirmer son existence, d'en connaître le plan, et d'appréhender son histoire, qui commence bien avant l'Antiquité.

Résultats

L'Ouche Torse avant l'Antiquité

Les premiers témoignages d'une occupation à l'Ouche Torse datent du IXe siècle avant notre ère. Des petits bâtiments sur poteaux (greniers ?), quelques fosses avec des résidus de foyers et des pierres chauffées, et de nombreux fragments de récipients en céramique attestent la présence d'un petit habitat, peu développé et sans doute occupé le temps d'une, voire deux générations.
L'habitat se déplace ensuite, au cours du VIIe – VIe siècle, sur le Mas de Champ Redon, situé à quelques centaines de mètres, dominant la plaine et l'Ouche Torse.
À partir du IIIe siècle avant notre ère, le site de l'Ouche Torse est réinvesti et un nouvel habitat s'installe, légèrement au sud du précédent. Il est occupé jusqu'au Ier s. avant notre ère, peu de temps avant l'implantation des premiers bâtiments de la villa antique.

Une vaste villa antique

La villa se compose de deux entités distinctes : la pars urbana et la pars agraria. Au nord, la partie résidentielle de la villa, la pars urbana, obéit à un plan classique : trois ailes disposées en U s'ouvrant à l'est sur une cour. Au sud, des fossés délimitent des parcelles dédiées à l'agriculture et à l'élevage, la pars agraria. L'ensemble de l'habitation est ceinturé par un fossé peu profond, de 4 m de large, qui marque nettement la séparation entre les deux espaces.
Les bâtiments agricoles entourant traditionnellement les villae antiques, la pars rustica, ne sont pas situés sur l'emprise de la fouille, mais devaient se développer plus à l'est, dans la continuité de l'habitation.

La partie résidentielle, ou pars urbana

La partie résidentielle, maison du maître, se déploie sur plus de 1 000 m². La fouille a permis de mettre au jour entre vingt et trente pièces, qui représentent cependant plusieurs phases successives de construction (reconstructions, agrandissements ou réaménagements), qui s'étalent entre le milieu du Ier siècle et la fin du IVe siècle.
Le corps central de l'habitation, d'une superficie de plus de 350 m², est divisé en quatre parties : deux salles de plan carré encadrent une troisième rectangulaire de plus grande dimension (120 m²). Elles pourraient correspondre aux salles de réception (triclinum). À l'ouest, une galerie se développe sur toute la longueur du bâtiment, sur 30 m. Enfin, quatre petits espaces forment l'aile sud de la villa, mais leurs fonctions restent indéterminées en raison de l'état d'arasement prononcé de ce secteur.Les façades des ailes ouest et nord sont dotées d'un portique, dont le sol en mortier a été retrouvé sur une largeur de 3 m. Cette galerie, espace de circulation couvert en liaison avec la cour, protégeait aussi des intempéries et de l'ensoleillement. Les pièces dites de fonction occupent la partie orientale de l'aile. Au centre, un secteur balnéaire, équipé d'un praefurnium (pièce qui permettait de chauffer les thermes), d'un hypocauste (système de chauffage par le sol) et de canalisations, a été mis au jour. Au nord, deux cours fermées se développent à l'arrière des bâtiments.
L'ensemble des pièces conserve des sols de différentes natures : mortier de chaux, béton de tuileau, cailloutis et terre battue.

Une riche demeure


Le mobilier archéologique retrouvé en quantité abondante correspond à celui prélevé sur ce genre de site. Il est principalement constitué de céramiques (assiette de service, cruche et pots à cuire), d'objets métalliques (clous, crochets, fiches), d'objets du quotidien et d'éléments architecturaux (enduits peints). 

La superficie de cette demeure, son mode de construction et la nature des aménagements témoignent certainement du statut privilégié des maîtres des lieux. Ce domaine agricole reste classique dans son organisation (habitation, bâtiments agricoles). Le plan en U des bâtiments résidentiels est un modèle connu. Toutefois, le site de la villa d'Ouche Torse a offert l'opportunité de fouiller une résidence au sein d'une partie de son environnement agricole.