
Pesons en terre cuite.
Ces objets servaient de poids pour lester les fils d'un métier à tisser.
Montison, Sorigny (Indre-et-Loire), 2012.
© Nicolas Holzem, Inrap
Ces objets servaient de poids pour lester les fils d'un métier à tisser.
Montison, Sorigny (Indre-et-Loire), 2012.
© Nicolas Holzem, Inrap
Description
La fouille menée sur le site de Montison, à Sorigny, a permis d'étudier un habitat rural occupé durant près de trois siècles, de la période gauloise (Ier siècle avant notre ère) à l'Antiquité (IIe-IIIe siècle de notre ère). Des aménagements successifs des bâtiments et de l'espace marquent la transformation progressive d'une ferme gauloise en villa antique.Résultats
De la ferme gauloise aristocratique …Vers 80 avant notre ère, un premier établissement s'implante sur le site de Montison, dans le territoire du peuple gaulois des Turons. Localisé sur le rebord d'un vaste plateau à la confluence des ruisseaux du Montison et des Longues Plaines, sa situation géographique est tant stratégique qu'ostentatoire. Visible dans le paysage et en position dominante, le site est également construit sur un sous-sol en grande partie composé de graves qui lui assurent une grande stabilité. De plus, la légère pente qui s'amorce vers les deux vallées assure un drainage de surface efficace de la zone bâtie.
Le site de Montison a la particularité d'avoir partiellement conservé les traces de son implantation initiale. Une palissade rectangulaire de 100 m de long sur 80 m de large délimite et protège une surface de 8 000 m² qui contient la cellule originelle de l'habitat.
Dans un second temps, et rapidement, les limites de l'habitat se renforcent avec le creusement d'un large et profond fossé, formant ainsi un enclos. Il est installé le long de l'ancienne palissade avant son probable démantèlement. L'enclos est subdivisé par deux modestes fossés, créant trois espaces distincts, peut-être destinés à différents types d'activités (domestiques / artisanales / agro-pastorale). Neuf bâtiments s'alignent le long des différents fossés à l'intérieur de l'enclos.
L'accès principal, à l'est, se fait par un porche monumental et une passerelle qui devait enjamber le fossé. Le bâtiment le plus imposant est construit au fond de l'enclos, à l'ouest, en face de l'entrée, comme il est usuel sur les sites ruraux gaulois.
… à la villa gallo-romaine
À partir de 70 de notre ère, s'opère un changement radical du plan d'ensemble de l'occupation. Le colmatage des fossés d'enclos, la vétusté des constructions, l'introduction de plans et de techniques typiquement gallo-romains aboutissent à la transformation progressive d'un établissement gaulois à enclos à une villa de type à deux cours avec pars urbana et pars rustica.
Longeant l'habitat au sud, un chemin nous indique la nouvelle entrée principale. Il permet l'accès à un secteur vierge de tout aménagement, interprété comme une cour. Celle-ci est bordée à l'est par des bâtiments sur poteaux et des enclos destinés à l'élevage. C'est la pars rustica.
Dans le prolongement de l'entrée et de la cour, un accès empierré matérialise le passage vers le secteur résidentiel de l'exploitation, ou pars urbana. Cette zone est également délimitée par des fossés et des palissades. L'habitat principal est aménagé avec des murs de pierres et de terre. D'une surface d'environ 200 m², il adopte une forme rectangulaire et est divisé en sept pièces réservées aux activités domestiques (cuisine, repas, couchage…).
Pars urbana et pars rustica sont disposées de façon symétrique. Elles forment un plan à deux cours dont l'organisation est largement répandue dans toute la Gaule. Au-delà de leur aspect fonctionnel, les fossés et murs de clôture sont des marqueurs visuels de propriété qui participent concrètement à la délimitation de l'espace privé.
Après l'abandon des lieux, entre la fin du IIe et le IIIe siècle de notre ère, cette partie du plateau est épisodiquement et sporadiquement occupé dans un but agro-pastoral au début du haut Moyen Âge.
Des activités diverses
La production de céréales est attestée de manière indirecte (nombreux bâtiments de stockage, répartis dans ou hors de l'enclos fossoyé), dès les premières phases d'occupation du site. La mise au jour de quelques fragments de meules en grès témoigne de l'activité de mouture, au moins dans un cadre domestique. Compte tenu de la nature ingrate du sol (argileuse et imperméable sur une grande partie du site) et des moyens aratoires de ces périodes, les rendements céréaliers devaient être moins élevés par rapport à d'autres terroirs plus propices. Les bâtiments agricoles annexes, une étable, et les enclos à bétail impliquent la présence de prairies au sein du domaine. La paille et le foin sont nécessaires pour la litière et le fourrage hivernal.
Mais si les bâtiments, ou bien les enclos à bétail, attestent une activité d'élevage, et en particulier pour la période antique, en revanche l'acidité du terrain a dissous les éventuels restes osseux, empêchant toute étude. La découverte, au sein du fossé d'enclos, de quelques scories provenant de deux étapes distinctes de la chaîne de travail du fer (réduction / affinage et travail de forge), témoigne de cet artisanat à la période gauloise et au tout début de la période antique. Enfin, le remarquable ensemble de pesons découvert au sein d'un bâtiment gaulois et à ses alentours révèle que le tissage était pratiqué dans le cadre domestique.