
Disposition des tombes « en rangées » et du mobilier. © C. Richarte, N. Bourgarel, F. Guériel, Inrap
Description
Le site est localisé sur la rive sud du port, à proximité de lactuel palais du Pharo. Il a été fouillé sur une superficie totale de 800 m2.Lopération a livré des éléments néolithiques et les restes dune structure semi-enterrée de lépoque grecque. Elle a aussi permis la découverte dun cimetière daté des VIIe et VIIIe siècles de notre ère.
Résultats
De la Préhistoire à lépoque hellénistique
Trois fosses circulaires de petites dimensions ont été découvertes dans la zone funéraire. Elles ont été datées par carbone 14 (14C) de 4927-4708 avant notre ère.
La fosse la plus intéressante présente un fond qui a rougi au feu. Elle contient de la céramique modelée, de nombreux coquillages, des éclats de silex, des restes animaux et des os humains (un membre inférieur dadulte) mêlés à des charbons de bois. La présence de cette jambe entière, déposée avec les chairs dans une structure domestique, sans doute un foyer réutilisé en dépotoir, est des plus étonnantes. Elle semble indiquer quelle a été traitée comme un déchet, comme lont été les autres vestiges. Lexistence de ces fosses atteste en outre une zone dhabitat proche, inédite sur la rive sud du port de Marseille pour cette période du Néolithique ancien.
Pendant l'époque grecque une structure semi-enterrée de grande dimension a été construite. Il sagit probablement dun silo, dont les parois et le fond sont couverts de blocs et de dalles. De très nombreux fragments damphores (du Ve au Ier siècle avant notre ère) et de céramique ainsi que des matériaux de construction comblent la structure, qui a été scellée au moment de son abandon par un gros bloc de poudingue (roche sédimentaire détritique).
Un cimetière aux VIIe et VIIIe siècles de notre ère
Au milieu du VIIe siècle, un cimetière vient simplanter dans ce secteur marginal, situé en face de la cité, à plus de 500 m du monastère de Saint-Victor.
Les archéologues ont constaté, sur une emprise de 500 m2, la présence de quarante-cinq sépultures ordonnées en bandes parallèles et orientées est-ouest. La régularité des ensevelissements et le fait que les fosses ne se mélangent pas entre elles plaident en faveur dune occupation du site dassez courte durée. Des éléments tels que stèles et croix étaient peut-être dressés devant les sépultures.
Les sépultures sont de trois types : fosses en pleine terre, coffres de bois et bâtières (tuiles disposées comme un toit, avec deux pans inclinés). Ces dernières, majoritaires, montrent des architectures soignées employant des tegulae (grandes tuiles plates) couvertes dimbrices (petites tuiles semi-circulaires) en couvre-joint (pour cacher les joints). Ces tuiles sont souvent décorées de marques faites avant cuisson (croix, entrelacs, demi-cercles).
Les défunts inhumés sont tous orientés tête à louest et les sépultures ne comportent aucun dépôt doffrande, conformément à la tradition chrétienne. Cependant plus du tiers des sépultures a subi une profanation : les aménagements et les ossements ont été déplacés, principalement les têtes et des bassins des défunts. Ceci est sans doute à mettre en relation avec le fait que plusieurs sujets ont été inhumés parés de riches vêtements, comme le montrent des fils dor retrouvés dans trois cas.
La population inhumée, en tout trente-quatre sujets, est en grande majorité constituée dadultes. Ne figuraient que trois enfants et deux adolescents. Concernant les adultes, les hommes et les femmes sont en proportion à peu près équivalente, avec de nombreux sujets âgés.
Cet échantillon nest donc pas du tout conforme avec la mortalité de lépoque : de nombreux enfants mouraient alors en bas âge. De plus, les tailles des personnes enterrées sont supérieures à la moyenne, surtout celles des hommes, que lon peut comparer avec les tailles des individus du prestigieux monastère Saint-Victor à la même époque. Ces observations, quil convient de relier aux profanations de sépultures et à la présence de fils dor, pourraient indiquer que lon a affaire là à une population sélectionnée et surtout privilégiée, enterrée à proximité de Saint-Victor.