Localisation des sites sur le territoire de Rennes

Zac Saint-Malo-Ille

Vue du bâtiment monumental occupant l'extrémité occidentale du site. Les dés maçonnés correspondant à de probables supports d'édicules ou de statues sont marqués par un A. La trace d'un escalier permettant la communication entre les deux galeries est bien visible malgré la récupération de ses matériaux. Des trous de poteaux, entourés en jaune sur le cliché, correspondent sans doute à un état primitif où existait déjà une galerie de circulation.  ZAC Saint-Malo-Ille, Rennes (Ille-et-Vilaine), 1988.  © Françoise Goupil, Afan
Vue du bâtiment monumental occupant l'extrémité occidentale du site. Les dés maçonnés correspondant à de probables supports d'édicules ou de statues sont marqués par un A. La trace d'un escalier permettant la communication entre les deux galeries est bien visible malgré la récupération de ses matériaux. Des trous de poteaux, entourés en jaune sur le cliché, correspondent sans doute à un état primitif où existait déjà une galerie de circulation.
ZAC Saint-Malo-Ille, Rennes (Ille-et-Vilaine), 1988.
© Françoise Goupil, Afan

Description

Le projet de construction d'un ensemble d'immeubles et de réhabilitation d'un quartier insalubre est à l'origine de cette fouille menée en 1987-1988 sur 4 000 m2. Sa localisation dans un secteur particulièrement sensible de l'agglomération antique avait motivé la réalisation d'un diagnostic archéologique. Celui-ci ayant révélé la présence de vestiges antiques, une fouille préventive a été engagée.

Résultats

Les parcelles, situées sur le flanc du coteau bordant l'Ille à l'est, sont occupées du début du Ier siècle de notre ère jusqu'au IIIe-IVe siècle. Pour urbaniser ces terrains plus facilement, dès le début de l'époque romaine certains secteurs naturellement pentus sont nivelés afin de permettre la création de terrasses destinées à accueillir le bâti. Parallèlement, dans l'angle nord-est, des fosses d'extraction d'argile de la terrasse alluviale fournissent la terre destinée au hourdis des parois à colombage des premiers habitats. Petit à petit, et surtout à partir de la fin du Ier siècle, ces constructions à architecture légère sont remplacées par d'autres recourant à l'emploi de la maçonnerie liée au mortier de chaux. Ces dernières, de plus en plus vastes, deviennent de véritables domus (grandes maisons urbaines luxueuses) au IIIe siècle.

Des rues de la ville antique reconnues pour la première fois
 

Pour la première fois, deux rues de la ville antique sont parfaitement identifiées. Dans la partie ouest de la fouille, un tronçon de cardo (rue orientée nord-sud) bordé par des bâtiments et auquel se raccorde au moins une venelle est conservé sur une dizaine de mètres de long. Cet axe de la ville antique mis en place au milieu du Ier siècle n'a pour l'instant été reconnu qu'à cet emplacement. Dans l'angle sud-est de la fouille c'est le bord d'un decumanus (rue orientée est-ouest) important menant notamment aux thermes publics (Collège Échange rue de Dinan) qui est mis en évidence. Il a par la suite été observé lors de la fouille menée au 61- 65 rue de Dinan et à l'emplacement du puits d'aération du métro rue de Dinan. Sa chaussée n'était conservée que sous la forme de lambeaux ; en revanche, des restes de fondations de stylobates (supports de colonnes) ont été retrouvés le long de son bord septentrional. Leur présence permet de déduire l'existence d'une importante galerie portique bordant cette rue. Cette dernière était sans doute liée à un vaste bâtiment du IIe ou du IIIe siècle, dont les vestiges n'ont pu être identifiés.  

Des artisans en bordure du cardo principal de la ville  

L'extrémité est du site borde le tracé d'une rue nord-sud actuellement considérée comme le cardo principal de la ville (Couvent des Jacobins et 3-5 rue St Malo). Au Ier siècle, cette zone est occupée par des échoppes d'artisans. On y trouve notamment des forges, dont quelques vestiges ont pu être observés. Des traces d'artisanat de tabletterie (travail de l'os) ont également été retrouvées sous la forme d'esquilles et de restes de bois de cervidés.

De riches maisons disposant de chauffages par le sol

Au IIIe siècle de riches demeures accaparent une bonne partie de l'espace dans ce secteur de la ville. Leur configuration n'a malheureusement pas pu être déterminée précisément, cependant l'existence de pièces chauffées par le sol au moyen de conduits de chauffe à plan rayonnant (hypocauste) suffit pour identifier la présence de ces luxueuses maisons. Une fresque représentant un personnage à grande échelle décorait le mur de l'une d'elles. Ce type de représentation relativement rare dans nos régions témoigne de la fortune de son propriétaire.  

Cinq de ces dispositifs de chauffage, parfois assez éloignés les uns des autres, ont été identifiés à différents emplacements de la fouille, ce qui permet de penser qu'au moins quatre ou cinq grands propriétés différentes occupaient les lieux. Dans la couche de démolition de l'un de ces hypocaustes plusieurs monnaies de la seconde moitié du IIIe siècle ont été découvertes. Elles marquent sans doute la période d'abandon de la maison.  

Une cave abandonnée     

Une petite cave quadrangulaire creusée à même le sol et remontant à la fin du Ier siècle ou au début du suivant a été retrouvée. Elle était l'un des rares témoignages de l'existence d'une maison, dont peu d'autres traces étaient conservées. Mais au fond de celles-ci plusieurs dizaines de vases à provisions encore soigneusement rangés les uns à côté des autres, ainsi qu'un panier en osier aujourd'hui disparu, ont été retrouvés. Leur présence laisse présager un abandon précipité des lieux, toutefois aucun autre indice n'a permis de conforter cette hypothèse.  

Un énigmatique bâtiment monumental  

À l'extrémité ouest du site, un immense bâtiment s'organisant autour d'un espace central entouré d'une large galerie de circulation intérieure borde le côté ouest du decumanus. Il est séparé de cette rue par un trottoir, couvert lui aussi, relativement large, et dont la taille est en rapport avec celle de la vaste construction, dont seule une petite partie était située dans l'emprise de la fouille. Ayant été très endommagé par divers remaniements de terrain postérieurs ainsi que par des campagnes de récupération de matériaux de la fin de l'époque romaine, ce bâtiment n'a été perçu que très partiellement. Toutefois la présence de restes d'enduits peints a été remarquée, de même que celle d'un escalier permettant de faire la jonction entre deux ailes de la galerie de circulation intérieure. Enfin trois dés soigneusement maçonnés s'appuyant contre le mur oriental de l'espace central ont été observés. Il s'agit vraisemblablement soit de bases de contreforts soit de supports d'édicules ou de statues imposantes nécessitant un appui solide. Tous ces indices soulignent le caractère monumental de la construction sans toutefois permettre d'en identifier la fonction.