Localisation des sites sur le territoire de Rennes

1 place de la Trinité

Plan du quartier d'après le livre rentier (inventaire listant les biens des grandes fortunes) du XVe siècle.  © Elen Esnault, Inrap, d'après les données de M. Le Boulch
Plan du quartier d'après le livre rentier (inventaire listant les biens des grandes fortunes) du XVe siècle.
© Elen Esnault, Inrap, d'après les données de M. Le Boulch

Description

Le diagnostic archéologique du 1, place de la Trinité a donné l'occasion d'aborder l'histoire de Rennes depuis l'Antiquité jusqu'à l'Ancien Régime. L'îlot s'appuie en effet sur le tracé de la muraille édifiée au IIIe siècle, dont une partie est conservée au sous-sol des immeubles bordant la place des Lices. 

Résultats

C'est à l'extrémité nord du castrum que le château comtal est édifié. Attesté dès le XIe siècle sous le nom de la « tour de Rennes », ce château à motte est incendié en 1182 et reconstruit au début du XIIIe siècle par Pierre de Dreux. Il aurait été constitué de six tours reliées par des courtines. Sur l'ordre du duc Jean V, le capitaine de Rennes Amaury de Fontenay le fait détruire en 1409. Il n'en reste aucun vestige visible et la documentation à son sujet est également très lacunaire.

Le fossé du château  

Lors du diagnostic, son fossé a été découvert, sans toutefois que sa largeur et sa profondeur aient pu être précisément établies. Les sources mentionnent une douve, en partie baillée (remblayée et louée comme jardin) au XVe siècle, mais dont le tracé reste marqué dans le paysage.

Le comblement du fossé, très riche en mobilier, permet d'en connaître davantage sur le château. Les vestiges de céramique sont attribués aux XVe-XVIe siècles, ce qui indique que la douve a été comblée à cette époque. Plusieurs fragments de verres à décor de pastilles de type Krautschrünck, datés du XVe siècle, ainsi que de nombreux fragments de vitraux y ont été récoltés. Les vitraux proviennent très certainement d'une architecture civile. D'autre part, la quantité et la qualité du mobilier doivent sans doute être mises en relation avec la présence immédiate du château et avec sa destruction partielle.  

On peut ainsi réinterpréter les sources : certes, une partie des logis a dû être abattue, notamment pour l'édification de la porte Saint-Michel en 1425, mais le reste du château a probablement perduré jusqu'à sa destruction définitive au cours des XVe-XVIe siècles. Une partie des matériaux de démolition a alors servi à remblayer la douve.  

L'hôtel des Monnaies du XVe siècle à nos jours  

D'après le livre rentier (inventaire listant les biens des grandes fortunes) de Rennes en 1455, l'îlot apparaît très urbanisé dès le XVe siècle. Des fondations attribuées aux XVe et XVIe siècles, composées de schiste local lié à l'argile, ont d'ailleurs été mises au jour à l'occasion du diagnostic. Elles correspondent aux façades postérieures des maisons à pan de bois situées en bordure de la rue de la Cordonnerie (actuelle rue de la Monnaie). Le cœur d'îlot est quant à lui occupé par des jardins, qui s'étendent jusque sur l'emprise de l'ancienne douve progressivement comblée.  

Ce même rentier mentionne déjà la présence de l'Hôtel des Monnaies. Les niveaux de cour, qui recouvrent les jardins médiévaux, correspondent probablement à son installation en 1451. L'édifice abrite la même fonction jusqu'en 1774, avant que la Monnaie de Rennes ne soit supprimée par un édit royal. Reconstruit en 1708, il est fortement remanié dans les années 1985-1987. On constate, au sous-sol, la présence de refends qui, ne se poursuivant pas aux niveaux supérieurs, pourraient correspondre aux vestiges de l'Hôtel du début du XVIIIe siècle. D'après les plans anciens, celui-ci intègre le rempart dans sa construction : la façade côté place des Lices présente une épaisseur importante, qui s'amoindrit au 3e étage en raison de la présence du chemin de ronde. Le rempart est encore en élévation jusqu'en 1772, puis une partie s'effondre.  

L'incendie, qui se déclare dans la nuit du 23 décembre 1720, ravage pendant six jours plus de mille immeubles avant d'être maîtrisé au prix de la démolition des maisons périphériques : grâce aux sœurs du prieuré Saint-Moran, qui firent abattre des bâtiments pour éviter la propagation des flammes, l'ilot de la Trinité a en effet constitué une des franges de l'incendie. Cet événement intimement lié à l'histoire de la ville peut être pour la première fois documenté par l'archéologie. Dans la cour principale de l'Hôtel, plusieurs traces de rubéfaction sur les pavés témoignent de la violence du feu. Aussitôt après la purge des niveaux de destruction, l'actuel Hôtel des Monnaies est rebâti dans les années 1720-1725.